Aller, pour le plaisirâŠ
François Monnier - Investir
"Lâhistoire fiscale bĂ©gaie dangereusement. Quelques lignes dans le projet de loi de financement de la sĂ©curitĂ© sociale (PLFSS) pour 2018 relancent le sujet de la taxation rĂ©troactive des gains dans le plan dâĂ©pargne en actions (PEA). Les actionnaires ne seraient pas les seuls touchĂ©s, les salariĂ©s aussi, via le plan dâĂ©pargne entreprise (PEE) et le plan dâĂ©pargne pour la retraite collectif (Perco). Un tel projet nâest pas nouveau. DĂ©jĂ , Ă lâautomne 2013, le prĂ©sident François Hollande et son gouvernement avaient tentĂ© ce type dâaventure fiscale.
A lâĂ©poque, les actionnaires et votre journal avaient combattu farouchement ce projet, Ă travers une pĂ©tition qui avait recueilli plus de 42.000 signatures et obtenu le soutien dâune trentaine de grands patrons.
La motivation en 2017 reste la mĂȘme quâen 2013 : lâEtat cherche, sous le couvert dâune simplification, Ă augmenter ses recettes fiscales pour remplir des caisses vides.
La taxation passerait de 10,8 % Ă 17,2 %
Il sâagit ici dâun vĂ©ritable matraquage. Le projet de loi de financement de la SĂ©curitĂ© sociale envisage une taxation rĂ©troactive des PEA des PEE et des Perco, au taux de prĂ©lĂšvements sociaux de 17,2 % Ă compter du 1er janvier, en lieu et place des taux successifs constatĂ©s durant la vie du placement. Lâeffet sera significatif pour les quelque 14 millions de Âpersonnes concernĂ©es (4 millions de PEA et 10 millions de PEE et Perco), puisque, en vingt et un ans, le taux du prĂ©lĂšvement social est passĂ© de 0,5 % en 1996 Ă 15,5 % actuellement. Il atteindra 17,2 % en 2018. ConcrĂštement, cela revient Ă faire passer une taxation moyenne des gains au sein dâun PEA ancien, de 10,8 % Ă 17,2 %. Câest Ă©norme. Ensuite, il convient de retraiter ces chiffres, en fonction de la durĂ©e de dĂ©tention de votre PEA et parce que le gouvernement souhaite que la taxation des cinq premiĂšres annĂ©es soit maintenue au taux historique. Câest le premier euro gagnĂ© au-delĂ des cinq annĂ©es dâouverture du plan qui serait taxĂ© au taux actuel.
Pour justifier cette mesure, il est fait Ă©tat dâun « double objectif dâĂ©quitĂ© et de simplification ». Or la responsabilitĂ© des diffĂ©rents taux de taxation incombe exclusivement Ă lâEtat. Les Ă©pargnants ne font que subir le zapping fiscal incessant. En 2018, nous en serons Ă la onziĂšme rĂšgle du jeu pour le seul PEA. En gros, une sanction fiscale tous les deux ans. Cela suffit ! Tout le monde se souvient quâen 1992, lors du lancement de ce PEA, la fiscalitĂ© des actions Ă©tait rĂ©ellement favorable Ă lâinvestissement dans les sociĂ©tĂ©s cotĂ©es. Les prĂ©lĂšvements sociaux Ă©taient symboliques, alors que, au 1er janvier 2018, ils atteindront 17,2 %.
Mieux encore, si on remonte Ă la crĂ©ation du Cac 40, fin 1987, il nâaurait pas Ă©tĂ© utile de crĂ©er un PEA pour se protĂ©ger du matraquage fiscal : les plus-values Ă©taient imposĂ©es au taux forfaitaire de 17 % (30 % avec le PFU, prĂ©lĂšvement forfaitaire unique, en 2018), les prĂ©lĂšvements sociaux nâexistaient pas (17,2 % en 2018), les opĂ©rations rĂ©alisĂ©es sous le seuil de cession de 42.838 ⏠étaient exonĂ©rĂ©es (pas de seuil prĂ©vu aujourdâhui) et les dividendes bĂ©nĂ©ficiaient dâun avoir fiscal de 50 % (nul aujourdâhui).
Quant au principe dâĂ©quitĂ©, les bras mâen tombent ! On pĂ©nalise ici les actionnaires les plus fidĂšles, ceux qui conservent leurs actions des annĂ©es, voire des dĂ©cennies.
Le gouvernement avait dĂ©jĂ prĂ©vu de supprimer lâabattement fiscal dans les comptes titres pour ceux qui gardent longtemps leurs actions. Cette fois, le coup est encore plus rude.
A aucun moment dans le projet Ă©lectoral dâEmmanuel Macron il nâa Ă©tĂ© question dâune taxation rĂ©troactive du capital ! Bien au contraire, le mouvement En marche ! se voulait favorable aux entreprises, aux start-up et Ă lâinvestissement Ă risque. En agissant ainsi, le gouvernement dâEdouard Philippe Ă©corne fortement toute la confiance retrouvĂ©e avec les annonces du remplacement de lâimpĂŽt de solidaritĂ© sur la fortune par lâimpĂŽt sur la fortune immobiliĂšre et du taux de taxation unique de 30 % pour les plus-values mobiliĂšres. Veut-il que les Ă©pargnants vendent toutes leurs actions et ferment leur plan dâici Ă la fin de lâannĂ©e afin dâĂ©viter ce matraquage Âpendant quâil en est encore temps ?"