Lâagenda 2020 est bien chargĂ© pour les investisseurs », explique le StratĂ©giste de Montpensier Finance
Publié le 12 Décembre 2019
« Nous sommes en train de basculer dâun monde coopĂ©ratif vers un monde de confrontation »
Wilfrid Galand, Directeur StratĂ©giste de Montpensier en est convaincu : les tensions politiques, sociales et commerciales qui sâaccumulent dans le monde auront des rĂ©percussions importantes sur les marchĂ©s en 2020.
En premier lieu, il souligne lâagenda Ă©lectoral dans deux pays stratĂ©giques : Taiwan, oĂč les indĂ©pendantistes tiennent la rampe dans les sondages rĂ©cents, et les Etats-Unis oĂč aucun scenario « Ă©vident » nâa encore Ă©mergĂ©.
Câest un des Ă©vĂ©nements que les investisseurs devront scruter lâan prochain, parmi dâautres que le stratĂ©giste a commentĂ© lors de la confĂ©rence dâautomne quâorganisait tout rĂ©cemment la sociĂ©tĂ© de gestion. Nous avons pu le rencontrer par lâentremise dâAmĂ©lie Burtin, Directrice Marketing et Communication.
La Chine et les Etats-Unis en duel pour longtemps
Avec la Chine devenue 2Ăšme Ă©conomie mondiale, la domination mondiale est un enjeu que les Etats-Unis entendent dĂ©fendre avec force. La face visible du conflit est dâordre commercial en dĂ©pit dâun paradoxe : le commerce extĂ©rieur affecte peu les Etats-Unis en comparaison des autres pays dĂ©veloppĂ©s, et il affecte moins la Chine que dâautres Ă©conomies Ă©mergentes comme celles du Mexique, des Philippines ou du Vietnam.
Le second front est moins visible mais tout autant stratĂ©gique. Pour contrer le projet chinois de la Route de la Soie, les Etats-Unis viennent de mettre en place avec le Japon le Blue Dot Network, une tentative dâĂ©riger des barriĂšres Ă lâentrĂ©e du commerce international en Asie.
Sur le plan financier, si les chinois dĂ©tiennent un portefeuille dâactifs amĂ©ricains bien diversifiĂ© (dettes souveraines et dâentreprises, actions), leur Ă©conomie a besoin de dollars amĂ©ricains. La paritĂ© USD/RMB a gagnĂ© 12% Ă prĂšs de 7,1, rendant nĂ©cessaire un rééquilibrage pour les chinois.
Dans la technologie, Huawei est banni du marché américain et les piratages de systÚmes informatiques pullulent.
Tout ceci commence à coûter cher :
Le commerce mondial recule fortement depuis 2017.
On estime Ă 0,5% au minimum lâimpact des tarifs douaniers sur la croissance amĂ©ricaine en 2020. Cet impact se situerait Ă -0,8% si les nouvelles mesures douaniĂšres en projet Ă©taient mises en Ćuvre.
La « croissance » des populismes
Wilfrid Galand a recherchĂ© les origines du populisme. Elles remonteraient aussi loin quâĂ lâempire romain vers -500 avant JC. CicĂ©ron lâa mĂȘme dĂ©crite : les populistes sont ceux qui contestent le SĂ©nat et en veulent au mode de vie des gens de bien.
Deutsche Bank prétend que son « Populism Index » tutoie les niveaux des années 30.
Lâinflation sous la pression dâune force âŠpeu Ă©voquĂ©e dans la presse financiĂšre
Câest le vieillissement dĂ©mographique, selon Wilfrid Galand, qui est la cause primaire du mouvement dĂ©flationniste mondial depuis 40 ans. La thĂ©orie veut que les personnes ĂągĂ©es dĂ©pensent moins et stockent plus, allĂ©geant les pressions inflationnistes. Mauvaises nouvelles pour les tenants du retour Ă lâinflation, la population mondiale va continuer de vieillirâŠ.
On prĂȘte surtout aux riches
Qui a emprunté le plus, en montant en en pourcentage du PIB ? Les Etats Unis et la Chine, qui prennent la part du lion dans le gonflement de la dette mondiale.
Ce sont en tous cas les gouvernements et les entreprises les plus déraisonnables : les ménages ont moins accru leur endettement.
La politique monétaire dans un corner ?
Pas tout Ă fait, car les Banques Centrales ont lâarme de dissuasion absolue : lâimpression monĂ©taire.
En revanche, elles nâont aucun pouvoir pour envoyer des hĂ©licoptĂšres distribuer de lâargent. Cela ne peut relever que des Etats, seuls juges et acteurs lĂ©gitimes pour dĂ©terminer la rĂ©partition de la distribution « aĂ©rienne » de lâargent.
Il nâempĂȘche, les banquiers centraux ont « rendu les armes » en 2019, comme en tĂ©moigne le rĂ©cent discours de Christine Lagarde qui appelle de ses vĆux une politique fiscale massive.
La peur des investisseurs au top
Le modĂšle Montpensier Market Scan indique que lâincertitude sur la politique Ă©conomique mondiale est au plus haut depuis 2000.
Le mĂȘme modĂšle pointe la divergence entre le sommet atteint par le MSCI World et le point bas du « Momentum des Ă©conomies mondiales », comparable Ă celui de 2016 et pas si Ă©loignĂ© de celui de 2009. Cette anomalie devra se rĂ©sorber dâune façon ou dâune autre, entrainant de lâincertitude et des Ă -coups sur les marchĂ©s.
La Chine ne peut plus faire ce quâelle veut quand elle veut
Les marges de manĆuvre ont sensiblement baissĂ© :
La relance budgĂ©taire affiche un dĂ©ficit de 3% mais omet le hors bilan des banques publiques. HSBC estime quâil est proche de 7% !
La balance des paiements est à peine équilibrée. Plus de dollars seraient les bienvenus (voir supra)
LâĂ©conomie amĂ©ricaine en pleine forme
Le consommateur amĂ©ricain est heureux (Michigan Index au sommet depuis 2003), le chĂŽmage au plus bas, et les marchĂ©s actions au plus haut (grĂące aux rachats dâactions en partie).
MAIS les patrons sont nettement plus prudents : le CEO Confidence index (sources : Haver Analytics, GSIR) est au mĂȘme niveau quâen 2001 et nâest guĂšre plus haut quâen 2008.
Serait-ce une peur irrationnelle de leur part ? Pas vraiment quand on observe les marges avant impĂŽts qui rĂ©gressent depuis 2015, un phĂ©nomĂšne masquĂ© par les baisses dâimpĂŽts qui ont dopĂ© les bĂ©nĂ©fices.
Un gros « market mover » en 2020 : les élections américaines
Câest en Janvier-fĂ©vrier 2020 que se cristalliseront les choix des amĂ©ricains pour leur candidat Ă la prĂ©sidentielle. Il est essentiel pour le prĂ©sident Trump que lâĂ©conomie reste dynamique car, hormis les charismatiques Ronald Reagan et Barack Obama, aucun prĂ©sident amĂ©ricain nâa jamais Ă©tĂ© réélu avec une Ă©conomie affaiblie.
La prĂ©diction est lâart le plus risquĂ© en matiĂšre dâĂ©lections amĂ©ricaines.
Les jokers ne manquent pas, or ce souvent ceux-lĂ qui lâemportent en AmĂ©rique.
Pour Wilfrid Galand, lâimportance de la candidature de Michael Bloomberg est sous-estimĂ©e par beaucoup dâobservateurs. Pourtant, lâhomme connait les mĂ©dias par cĆur : il sait comment cibler des discours politiques moyennant des Ă©tudes de marchĂ© poussĂ©es. On se rappelle que ce fut une clĂ© de succĂšs du candidat Obama.
Europe : lâAllemagne peut-elle casser le « Schwarz Null » ?
Le « zĂ©ro noir » est la rĂšgle dâor allemande en matiĂšre budgĂ©taire. Câest la constitution allemande qui interdit au dĂ©ficit de dĂ©passer les 0,35% du PIB !
Bien sĂ»r ! LâĂ©conomie allemande est forte de ses entreprises et de son savoir-faire. Mais ce sont tout de mĂȘme 12% du PIB germain qui dĂ©pendent du secteur automobile, actuellement en plein dĂ©sarroi y compris sur le plan social comme on commence Ă le voir.
LâĂ©conomie allemande a les moyens de sa relance, mĂȘme si son chĂŽmage est encore bas ce qui limiterait lâintĂ©rĂȘt du soutien public. Mais encore lui faut-elle accepter de sacrifier le « Schwarz Null ».
In Fine, lâallocation dâactifs que recommande Montpensier Finance
Actions lĂ©gĂšrement surpondĂ©rĂ©es, en favorisant les actions europĂ©ennes au dĂ©triment des amĂ©ricaines. Neutre sur le Japon, SurpondĂ©rĂ© sur la Chine, neutre sur lâInde, et sous pondĂ©rĂ© sur BrĂ©sil et Russie
Obligations sous pondĂ©rĂ©es avec une position neutre sur la dette dâentreprise, sous pondĂ©rĂ©e sur le souverain et surpondĂ©rĂ© sur les Ă©missions convertibles et Ă©mergentes.