Bourse :
Avant l’hydrogène , faites le plein d’ammoniac
Le secteur du transport maritime doit réduire davantage ses émissions de gaz à effet de serre. L’ammoniac est perçu comme le combustible le plus prometteur à brève échéance devant l’hydrogène. Retrouvez notre sélection de valeurs pour profiter de la conversion écologique de la marine marchande.
Il y a urgence ! Le 2 décembre dernier, le secrétaire général des Nations unies a souligné la gravité de la crise climatique. «L’humanité fait la guerre à la nature. C’est une entreprise suicidaire.» a grondé António Guterres, lors d’un discours historique, appelant la communauté internationale à passer à l’action.
Parmi ses priorités : atteindre la neutralité carbone à l’échelle mondiale dans les 30 prochaines années.
Cette intervention a fourni l’occasion au patron de l’ONU de rappeler à l’ordre un secteur d’activité qui, jusqu’à présent, n’a guère fait d’effort pour réduire son empreinte carbone.
«Si le secteur du transport maritime était un pays, il serait le sixième plus grand émetteur de gaz à effet de serre au monde. L’an dernier, lors du Sommet sur l’action pour le climat, nous avons lancé la Coalition Objectif zéro dans le transport maritime pour obtenir que les navires de haute mer passent à zéro émission d’ici à 2030.»
Peine perdue
«Les politiques actuelles ne sont pas à la hauteur des promesses qui ont été faites. Pour que le secteur du transport maritime respecte ces engagements, des mesures réglementaires et fiscales doivent être prises et appliquées. Sans cela, l’objectif zéro émission nette ne sera qu’un horizon lointain. Il en va de même pour l’aviation.»
Ce coup de semonce de l’ONU fait écho à la demande du parlement européen qui réclame «des mesures plus strictes pour réduire les émissions du transport maritime.». En l’occurrence, «inclure les navires d’une jauge brute égale ou supérieure à 5.000 dans le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE)» et «introduire des exigences contraignantes pour que les compagnies maritimes réduisent leurs émissions annuelles moyennes de CO2 par activité de transport d’au moins 40% d’ici à 2030 pour tous leurs navires».
Pour autant, les grands acteurs du transport maritimes n’ont pas attendu ces admonestations pour se mettre au travail afin de réduire dans les meilleurs délais leurs émissions de gaz à effet de serre.
Plusieurs solutions sont déjà dans les tuyaux chez les motoristes tandis que les compagnies pétrolières prennent position sur les carburants décarbonés.
Pour miser en Bourse sur cette révolution du transport maritime, nous avons retenu plusieurs profils de sociétés qui pourraient en tirer profit.
Le marché du GNL : un relais de croissance pour GTT
En France, GTT y voit un relais de croissance.
«À lui seul, le marché du GNL carburant représente un potentiel de réduction des émissions tout à fait significatif au niveau planétaire.» plaide Philippe Berterottière, PDG du groupe. La société d’ingénierie, leader mondial des membranes de confinement pour le transport maritime du gaz naturel liquéfié (GNL) estime être dans une position idéale pour développer sa présence sur le GNL carburant, notamment pour l’équipement des navires de grande taille.
L’un de ses premiers clients, CMA CGM opère déjà 7 porte-conteneurs au GNL et comptera d’ici 2022 une flotte de 26 porte-conteneurs de différentes tailles. L’armateur français compte sur «cette énergie d’avenir qui préserve la qualité de l’air en éliminant 99% des oxydes de soufre et des particules fines, 85% des émissions d’oxydes d’azote, et permet d’émettre jusqu’à -20% d’émissions CO2 par rapport à une motorisation au fuel.»
Fin octobre, le carnet de commandes de GTT s’élevait à 17 unités sur ce créneau d’avenir, essentiellement des porte-conteneurs.
Alors que la solution GNL semble être la plus mûre, deux autres technologies ne manquent pas d’atouts pour s’imposer dans les salles des machines des navires marchands : l’ammoniac et l’hydrogène.
L’ammoniac : deux groupes nordistes en position
En Finlande, le motoriste Wärtsilä (coté à la Bourse d’Helinski) travaille actuellement sur un prototype de moteur quatre temps alimenté à l’ammoniac (un combustible qui n’émet pas de CO2 en usage). Avantage, l’ammoniac serait moins coûteux que l’hydrogène et le méthanol.
Seule ombre au tableau, la production industrielle d’ammoniac est très gourmande en gaz naturel ou autre énergies fossiles et donc fortement émettrice de CO2. On parle de 1,5% des émissions mondiales contre 2,9% pour le transport maritime. Seule une production verte permettra de réduire son empreinte carbone.
Justement, le norvégien Yara a annoncé le 7 décembre dernier la mise en route d’un projet d’ammoniac vert à grande échelle. «L’hydrogène a beaucoup de qualités pour produire une énergie sans émissions. Mais ce n’est pas un produit facile à stocker et à transporter contrairement à l’ammoniac.» a plaidé Svein Tore Holsether, le PDG du groupe chimique, lors de la présentation de son nouveau projet aux investisseurs.
Un point de vue partagé par de nombreux acteurs mondiaux dont ceux rassemblés au sein du consortium japonais Green Ammonia, par exemple.
Les piles à combustible
Autre piste, les piles à combustible, utilisées pour convertir le carburant en électricité, pourraient prendre place à bord des navires. En effet, cette technologie peut améliorer l’efficacité de la conversion énergétique de plus de 60%, et même 80% en exploitant la chaleur résiduelle. Autre avantage, cette technologie fonctionne avec plusieurs types de carburants y compris l’hydrogène ou l’ammoniac.
Cependant, les piles à combustibles sont plus onéreuses que les moteurs thermiques. Les spécialistes de cette technologie qui parviendront à réduire ces coûts seront sans doute les chouchous des investisseurs à l’image du canadien Ballard dont l’action, cotée à la Bourse de Toronto a grimpé de 153% depuis le début de l’année. Malgré ce rally haussier sur le titre, son potentiel d’appréciation reste encore élevé.
Selon Factset, l’objectif de cours des 11 analystes qui suivent la valeur se situe actuellement à 32,22 dollars canadiens contre un cours de Bourse de 23 dollars actuellement.
Trois actions à acheter
C’est notre valeur préférée de cette sélection avec GTT. Yara dont la valeur d’entreprise ne représente que 5,8 fois l’ebitda 2021 peut aussi être mise en portefeuille. Quant à Wärtsilä, le motoriste devra d’abord réussir ses tests pour convaincre la communauté financière. Aujourd’hui, le titre semble bien valorisé.
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