Transmis par DAC
18.05.09 LT - Alors que l’Inde élit son parlement, la Bourse de Bombay rebondit. Depuis janvier, la hausse dépasse les 20%, sur fond de rebond général des marchés. Gérant chez J.P. Morgan Asset Management, en charge notamment du fonds JF India, Rajendra Nair juge le potentiel du marché indien considérable à long terme.
Le rebond continuera-t-il ces prochaines semaines?
Rajendra Nair: Nous ne savons pas si cette embellie est passagère ou de longue durée, mais ce n’est pas notre première préoccupation. La politique du fonds ne consiste pas à profiter des reprises du marché à court terme, mais à identifier les opportunités et à investir sur le long terme. Le rebond actuel de l’indice Sensex tend à surpasser les performances de notre portefeuille, du moins provisoirement. Mais cela ne nous inquiète pas, car nos investissements se basent sur un horizon temps long.
– Votre stratégie consiste donc à rechercher les titres sous-évalués?
– Disons plutôt les titres dont la valorisation demeure attractive. Nous faisons du stock picking et suivons une approche ascendante axée sur le potentiel des sociétés à long terme. Dans notre stratégie d’investissement, long terme est le mot clé. Nos choix sont dictés par l’analyse des fondamentaux du secteur et des compagnies.
En ce moment, la valorisation de nombreuses sociétés est vraiment attrayante. Mais l’attrait des actions indiennes vient de ce que le pays est encore au début de son développement. Il y a des opportunités d’investissement fascinantes et un potentiel de croissance économique intact, malgré le ralentissement récent. Cette économie sera vraisemblablement la seconde de la planète en 2050, derrière la Chine.
– Pourtant, de nombreux indicateurs, tels que la production industrielle, sont en chute libre…
– C’est effectivement le déclin de la production industrielle qui est la cause principale du ralentissement de l’activité dans le pays. La croissance du PIB reste toutefois supérieure à celle des pays occidentaux. Parmi les grandes économies, seule la Chine fera mieux en 2009. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’il y a une certaine reprise de la demande. Les indicateurs avancés, la demande de ciment ou les ventes de deux-roues, font entrevoir un regain de vigueur de la consommation.
Voyez-vous ce mĂŞme regain de vigueur pour le secteur financier?
– En Inde, les services financiers sont un bon indicateur de la consommation générale, et leur croissance semble bien résister. Ceux-ci ne dépendent pas des crédits à court terme et ne reposent pas sur des leviers excessifs. Les financières indiennes sont, à bien des égards, mieux positionnées que leurs homologues occidentales. La baisse des taux d’intérêt devrait renforcer cette situation dans les mois à venir.
– Les producteurs de produits de base ne risquent-ils pas de subir le ralentissement économique?
– C’est vrai. Mais nous faisons une distinction entre les valeurs cycliques domestiques et globales. Ces dernières regroupent les producteurs d’acier, d’aluminium, ou autre, qui évoluent à l’échelle mondiale. Nous les sous-pondérons. Par contre, nous sommes très positifs sur les cycliques domestiques, à l’instar des sociétés actives dans le bâtiment, dont les prix sont déterminés par la demande intérieure indienne.
– 2008 fut délicate pour les actions émergentes. Avez-vous essuyé des retraits d’argent?
– Il est vrai qu’en 2008, nous avons enregistré des sorties. Ce constat est valable pour la majorité des fonds actions, pas seulement ceux des pays émergents. De manière générale, en Inde, on estime les retraits de capitaux effectués par les investisseurs étrangers à 15 milliards de dollars l’an dernier et à 2 milliards au premier trimestre. Mais il y a fort à parier que le rebond des marchés a inversé la tendance. En ce qui concerne notre fonds, je pense pouvoir dire que l’année en cours est plutôt caractérisée par des entrées nettes de capitaux.
– Vous aviez des actions de Satyam Computer Services, qui ont chuté en janvier en raison de déboires judiciaires. Quel impact cela peut-il avoir sur la bourse indienne?
– Ce cas est une fraude comptable. Les comptes étaient audités par PricewaterhouseCoopers, une société sérieuse. Les normes de publication des comptes en Inde sont excellentes. Mais même les règles les plus strictes ne peuvent éliminer complètement la fraude.
De tels incidents se produisent partout: il suffit de se rappeler l’affaire Enron. Cette fraude peut affecter la perception quant au risque de bonne gouvernance des entreprises indiennes. Mais il ne faut pas en surestimer l’impact. En outre, les normes comptables ont été encore renforcées à la suite de cette affaire.