Lithium : l’extraction commence dans une usine géothermique d’Alsace

Lithium : l’extraction commence dans une usine géothermique d’Alsace

Le lithium est un minéral essentiel pour la transition énergétique, car, nous le savons bien, il est utilisé en quantités massives pour les batteries, qu’elles soient stationnaires ou destinées aux véhicules électriques. Son accessibilité est donc un enjeu de souveraineté majeur, puisqu’il s’agit d’éviter d’être mis sous dépendance pour le lithium tout comme aujourd’hui pour les hydrocarbures. Or l’Alsace pourrait en détenir une des clés.
Le lithium peut être trouvé à plusieurs centaines de mètres sous terre, dissous dans des saumures géothermales, c’est-à-dire des eaux souterraines salées dont la température est très élevée. L’intérêt de ce type de gisements est double : d’une part, classiquement, leur chaleur peut fournir de l’énergie géothermique, et d’autre part, plus récemment, leur traitement peut fournir des ressources minérales d’intérêt, et notamment le lithium. La coproduction d’énergie et de lithium est ce qu’on appelle le lithium géothermal.

Un gisement colossal dont l’exploration ne commence qu’à peine

Or le gisement en Alsace est potentiellement énorme : il pourrait répondre à 10% à 30% des besoins européens, au sein de filières locales de construction de batteries. Cela permettrait ainsi d’éviter d’avoir à utiliser du lithium produit de l’autre côté de la planète, en Argentine ou en Australie, puis transformé en Chine avant d’être importé en Europe, circuit peu vertueux, s’il était besoin de le souligner.
De façon concrète, le projet EuGeLi (European Geothermal Lithium Brines) a validé la production de lithium à partir de sources géothermales. Ce projet a été financé par l’Institut Européen d’Innovation et de Technologie Matières Premières (EIT Raw Materials) et coordonné par le groupe minier français Eramet. Une unité d’extraction à été installée à la centrale géothermique de Soultz-sous-Forêts située au nord de Strasbourg et a permis de produire en 2021 du lithium de qualité batterie.

Le projet Alsace Géothermie Lithium (Ageli) a pris la suite d’EuGeLi, réunissant Eramet et Électricité de Strasbourg. Son objectif est de produire sur le sol français un minimum de 10 000 t de carbonate de lithium par an à l’horizon 2030. Il s’agit de la quantité de lithium nécessaire à la construction de 250 000 véhicules électriques par an, ou encore environ 10% des besoins estimés de la France à cette échéance.

À plus court terme, Ageli se donne pour objectif de valider l’efficacité et la stabilité du procédé sur le long terme, par un test de 6 mois minimum en continu. La boucle d’extraction est installée dans la centrale géothermique de Rittershoffen, à mi-chemin de Strasbourg et de Karlsruhe, et qui alimente aujourd’hui en chaleur une amidonerie. Et son démarrage est imminent. Il apportera son lot de connaissances et de retour d’expérience, nous n’en doutons pas.

bonjour,

Espérons qu’il n’y ait pas d’opposition locale à ce projet.
Et aussi que ce projet soit viable avec un réel potentiel, pas un simple engouement médiatique.

Dans l’Allier, les promesses d’un gisement géant de lithium

C’est une grande cuvette, de 600 mètres de longueur sur 300 de large. Au sommet, à une centaine de mètres de hauteur, des pins marquent le début de la forêt des Colettes, 2 000 hectares de résineux, chênes et hêtres, qui couvre le sud du département de l’Allier. Une ligne de démarcation très nette sépare les roches micaschistes, de couleur brune, du granit, quasiment blanc. Sur la partie granitique, des gradins signalent une exploitation humaine

Sur le dernier d’entre eux, une pelle mécanique remplit un camion-benne. Bienvenue à la carrière de Beauvoir, à la frontière entre l’Allier et le Puy-de-Dôme. En ce mercredi après-midi, le soleil brille, mais il aurait pu neiger puisque la carrière est située sur les contreforts du Massif central, à plus de 700 mètres d’altitude. Aujourd’hui, le groupe Imerys exploite le granit de Beauvoir pour en extraire du kaolin, qui sera utilisé pour fabriquer de la porcelaine. Demain, le site pourrait être l’une des plus importantes mines de lithium d’Europe.

Il y a deux ans, Imerys avait dévoilé son projet XXL : produire chaque année 34 000 tonnes d’oxyde de lithium destiné aux batteries pour véhicules électriques. De quoi équiper 700 000 voitures par an ! Le site présente de nombreux atouts, les plus importants étant que la future mine se trouve déjà sur une exploitation en service depuis cent cinquante ans et dont Imerys est propriétaire. Mais ses dirigeants sont bien conscients de la difficulté de la tâche qui les attend : cela fait plusieurs décennies qu’une nouvelle mine n’a pas été ouverte dans l’Hexagone.

« Une mine responsable »

Le processus de concertation avec la population vient tout juste de débuter. Mardi dernier, le groupe français a ouvert le premier débat public à Moulins-sur-Allier, la préfecture du département. Pendant trois heures, les équipes d’Imerys ont discuté, argumenté, expliqué leur projet. Ce premier débat sera suivi d’une douzaine d’autres, dans les communes voisines de la mine ou des installations prévues, et même à Paris ou par visioconférence.
La commission nationale du débat public remettra ensuite une synthèse, qui pourrait amener des modifications dans le projet. Un processus qui n’offre pas la garantie d’échapper à une opposition active. Imerys travaille toutefois beaucoup à minimiser les désagréments liés à la mine. « Nous visons une mine responsable, ce qui signifie que nous cherchons à éliminer les impacts négatifs quand c’est possible, à les minimiser si ça ne l’est pas et à les compenser pour ceux qui restent », explique Alan Parte, vice-président d’Imerys en charge des projets lithium. Chaque point a été examiné.

En premier lieu, la mine sera souterraine - entre 75 et 400 mètres de profondeur - ce qui diminue grandement l’impact environnemental et les nuisances sonores. D’autant que le concassage des pierres se fera également en sous-sol
Une première usine, directement sur le site, va séparer les minéraux contenus dans le granit, c’est-à-dire le mica - qui renferme le lithium -, le feldspath et le quartz. Le mica sera ensuite envoyé, via une canalisation de 15 km de long, vers une plateforme de chargement ferroviaire.

À ce moment, le train prendra le relais pour une cinquantaine de kilomètres, vers une seconde usine, dite de conversion, afin d’extraire l’hydroxyde de lithium. Ces choix permettent d’éviter qu’une centaine de camions sortent de la mine chaque jour. À chaque étape, l’utilisation de l’eau sera limitée au maximum, notamment en utilisant des circuits fermés et en réutilisant la ressource. Au global, 90 % de l’eau sera recyclée