"Les bourses ont perdu une dizaine de pour cent en deux semaines. L’emploi US a sauvé la séance de vendredi in extremis mais pour Guy Wagner (Banque de Luxembourg Investments - BLI), la grande glissade n’est pas terminée…"Dans une interview donnée au journal L’Echo du samedi 6 août, Guy Wagner répond en trois questions aux craintes liées à la conjoncture de ces derniers jours.
Le pire est-il passé sur les marchés boursiers ?
Cela dépend. Si l’on prend en considération le court terme, on observe que les marchés ont baissé durant dix jours de suite, et avec une correction relativement importante. On peut donc s’attendre à un rebond technique de quelques pour cent.
Est-ce que pour autant le pire est derrière nous? Je crains que non. L’optimisme des marchés et des investisseurs, jusqu’il y a peu encore, sur les perspectives de croissance et de manière générale sur celles des marchés boursiers nous a toujours surpris. Pour moi, nous nous trouvons dans un environnement clairement dangereux où la protection du capital doit l’emporter sur la recherche du rendement. Je pense que les investisseurs devraient mettre à profit les rebonds des marchés pour diminuer les risques dans un portefeuille.
Qu’est-ce qui vous fait dire que l’environnement est clairement dangereux ?
Il y a un élément cyclique et un autre de nature conjoncturelle.
Le premier, classique celui-là, concerne les indicateurs qui se sont détériorés ces dernières semaines et pointent clairement vers une nouvelle récession l’année prochaine. Je pense que la possibilité d’une récession, notamment aux Etats-Unis, s’est récemment renforcée. Et je ne pense pas qu’une récession soit déjà intégrée dans les cours boursiers. Le risque d’une baisse supplémentaire des marchés existe.
Le second élément est de nature plutôt structurelle. Il s’agit de la fragilité du système financier. On a un endettement élevé des États qui fait que la solution classique que l’on avait encore il y a 3 ans, quand les États sont venus sauver le secteur financier, n’est plus possible. À présent, si l’État court des risques, il n’y a plus personne pour le sauver. C’est la dette extrêmement importante dans la zone euro qui rend cette situation exceptionnelle. Une solution est beaucoup plus difficile à trouver chez nous qu’aux Etats-Unis. La cohésion et la survie de la zone euro est dans une certaine mesure en danger.
Cet environnement est-il défavorable aux actions ?
Dans un premier temps, oui. À plus long terme, nous pouvons nous poser la question, surtout en partant de l’hypothèse qu’il faut quand même investir son épargne dans quelque chose.
Les emprunts d’État ont perdu leur caractère traditionnel de valeur refuge sur la plupart des marchés, excepté pour le Bund et le marché des obligations scandinaves notamment. La confiance dans les deux grandes monnaies du monde n’est plus là non plus.
Les actions peuvent dans ce contexte être intéressantes. Des actions de sociétés de très grande qualité, offrant des dividendes intéressants, peuvent constituer une alternative à plus long terme. Mais à court terme, elles n’échappent pas à la dégradation des statistiques économiques et au problème des dettes.
À court terme, le cash est l’actif qui court le moins de risques.
En ce qui concerne la gestion de nos fonds, nous insistons sur la qualité des actifs détenus. Nous privilégions des entreprises très peu endettées, les dividendes et l’augmentation de la pondération des marchés émergents matures (Asie du Sud-Est) dans les portefeuilles. Nous combinons tout cela avec une stratégie de « long-short ». C’est-à-dire que nous achetons des actions individuelles, et, pour réduire le risque marché, nous vendons en même temps des futures sur indices.