Concurrence chinoise, défi de l’électrique : le grand blues de l’automobile allemand
L’industrie automobile allemande a le blues. Le moteur de tout un pan de la première économie européenne s’est grippé ces derniers mois. Les mauvaises nouvelles s’accumulent chez les constructeurs et les équipementiers. Contraints d’accélérer le passage à l’électrique en Europe et de rattraper en Chine les constructeurs locaux et Tesla dont la part de marché croissante les menace, les Volkswagen, BMW, Mercedes, Bosch, Continental, ZF tentent de faire front
Numéro deux mondial de l’automobile, le groupe Volkswagen (668 000 employés dans le monde en 2022), a annoncé qu’il allait réduire de 20 % sa masse salariale ces prochaines années. Les syndicats viennent de donner leur feu vert. Les départs en préretraite dès 57 ans et les mesures d’économies sont enclenchés. « Il est évident qu’à l’avenir, nous devrons travailler avec moins de personnel dans de nombreux domaines chez Volkswagen, a déclaré Thomas Schäfer, le PDG de la marque qui a donné son nom au groupe. La situation est critique. De nombreux marchés sont sous pression, nos commandes, en particulier pour les voitures électriques, sont inférieures à nos attentes, a-t-il averti en novembre dernier. Avec nos structures existantes, et nos coûts élevés, nous ne sommes plus compétitifs. »
D’autres géants de l’industrie réajustent leurs effectifs en Allemagne. Bosch, le premier équipementier automobile mondial, va supprimer jusqu’à 1 500 postes d’ici à la fin 2025 sur deux sites à Stuttgart-Feuerbach et Schwieberdingen dans le Bade-Wurtemberg, tous deux dédiés aux transmissions et donc aux motorisations thermiques.
Les constructeurs allemands ont depuis longtemps misé sur d’autres régions que l’Europe pour assurer leur croissance et leur rentabilité. Une stratégie bénéfique, le marché européen étant moins dynamique. La Chine a été leur martingale avec des marges à deux chiffres pour les ventes de véhicules thermiques. Le marché automobile chinois connaît une croissance encore solide (même si les Occidentaux ne dégagent plus autant de bénéfices). Au total, 26 millions de voitures particulières neuves devraient avoir été écoulées en Chine en 2023. Alors qu’en Europe, seulement 10,3 millions
Mais le miracle chinois n’opère plus. Les Occidentaux se sont fait doubler par de nouveaux acteurs chinois devenus les vedettes des « new energy véhicules » (NEV), hybrides et électriques en plein essor. Ainsi sur les huit derniers mois, les dix plus gros vendeurs de ces voitures sont tous chinois, sauf Tesla, numéro deux avec 7,8 % de part de marché derrière BYD, le grand leader qui en totalise 36 %. Et parmi les dix modèles 100 % électriques vendus en Chine sur huit premiers mois de 2023, l’ID4 de Volkswagen arrive en 9e position alors que la Model Y et la Model 3 caracolent au 1er et au 2e rang.
À l’export, ces constructeurs chinois, encore mineurs en Europe, vont prendre du muscle. Les analystes d’UBS estiment que les marques chinoises devraient s’arroger un tiers du marché mondial d’ici à 2030, contre 17 % aujourd’hui, au détriment des constructeurs européens. Dans cinq ans ces véhicules seront d’une qualité équivalente à celle des Allemands », prédit Patrick Koller, le PDG de l’équipementier Forvia (Faurecia fusionné avec Hella). Les géants allemands seront donc défiés sur le segment où ils ont longtemps été rois.