Assurance vie : Generali massacre le fonds en euros
Publié le 27.09.2019 à 16h10 • Mis à jour le 27.09.2019 à 16h56 dans mieux vivre
Dans un contexte de taux d’intérêt négatifs sur les emprunts d’Etat, l’assureur Generali a annoncé des mesures radicales afin de limiter l’accès et l’attractivité de ses fonds en euros. Décryptage de ces décisions, avec l’oeil de l’épargnant.
par Aurélie Fardeau
Mercredi 25 septembre, le PDG de Generali France, Jean-Laurent Granier faisait savoir, par le biais des Echos, que l’assureur italien souhaitait tourner la page du fonds en euros. Crédit : Jaap Arriens/Sipa USA/SIPA
L’annonce a fait l’effet d’une bombe. Mercredi 25 septembre, le PDG de Generali France, Jean-Laurent Granier faisait savoir, par le biais des Echos, que l’assureur italien souhaitait tourner la page du fonds en euros dans un contexte de taux d’intérêt négatifs. En pratique ? La compagnie qui gère des contrats distribués par son réseau d’agents généraux, par les conseillers en gestion de patrimoine (Himalia notamment) et sur Internet via les courtiers et banques en ligne (Boursorama, ING, LinXea…) a annoncé plusieurs mesures sévères.
Tout d’abord, une baisse significative du rendement de ses fonds en euros. « Nous ne voulons pas donner l’illusion qu’il serait encore possible de servir un rendement à 1,50 % pour un contrat en fonds en euros alors que le taux sans risque est négatif », a dit le patron dans les colonnes du quotidien. L’an dernier, l’assureur avait servi entre 1,44 % (fonds Elixence) et 2,45 % (fonds Euro Innovalia – un fonds à dominante immobilier, qui va par ailleurs fermé).
Generali est en mesure de servir un rendement de 1,50%
En parallèle, des réserves seront faites afin de « protéger l’épargne accumulée de nos assurés dans la sérénité et sur la durée », a indiqué Jean-Laurent Granier. Rappelons que fin 2017, la provision pour participation aux bénéfices (les fameuses réserves) de Generali Vie se montait à 2,71 %, selon les données de Good Value for Money. En ajoutant les plus-values latentes (non concrétisées) et la réserve de capitalisation (plus-values réalisée), le chiffre monte à 9,22 %. Indiquons en outre que le taux moyen de rendement des actifs détenus par la compagnie Generali Vie sur 2018, s’est monté à 3,08 % (avant prélèvement des frais de gestion et mises en réserve). Comprenez donc que Generali est tout à fait en mesure de servir un rendement de 1,50 % mais que la compagnie ne souhaite pas le faire. D’ailleurs, elle avait déjà commencé à couper le robinet ces dernières années, notamment sur Eurossima, le fonds en euros dédié aux contrat Internet. A 1,65 % l’an dernier, le support avait en effet perdu de sa superbe.
Durcissement des contraintes d’accès au fonds en euros
Autre mesure choc : les versements sur le fonds en euros seront limités à 40% du total. Une contrainte d’accès déjà existence dans de nombreux contrats mais que Generali choisit de durcir drastiquement. Les conseillers qui vendent ces produits auront fort à faire pour concilier les contraintes imposées par la maison italienne et les impératifs liés au devoir de conseil, sur lequel l’ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution) est très attentif. A noter que du côté des distributeurs Internet, on s’interroge pour savoir à quelle sauce ils vont être mangés. Si certains pensent être concernés par la mesure, d’autres estiment y échapper. Ainsi, Boursorama Banque assure ne pas imposer de limite d’accès. “On se prépare à toutes les éventualités mais nous n’avons pas de contraintes d’unités de compte pour accéder au fond en euros pour le moment, ni au 1er octobre”, indique Benoît Grisoni, directeur général de Boursorama.
A la place du fonds en euros, les assurés sont incités à se reporter sur les unités de compte et sur le fonds croissance (ou euro croissance) de la maison, dénommé G Croissance 2014 (0,01 % en 2018, 3,30 % annualisé depuis le lancement en 2015). Celui-ci diffère fortement du fonds en euros. En effet, adieu l’effet cliquet : sa garantie en capital n’est obtenue qu’à une échéance donnée, allant de 8 à 30 ans. De plus, cette garantie peut être modulée, de 80 à 100 %. Une sorte de fonds en euros light. Principal écueil de ce produit, il suppose – pour financer la part garantie – que l’assureur investisse dans des actifs extrêmement sûrs. Seule une petite partie peut être placée sur des marchés plus dynamiques. C’est pourquoi de nombreuses compagnies ont jusqu’à présent dédaigné ce produit, jugeant le contexte extrêmement peu propice à leur lancement.
Un assureur qui ne veut plus assurer
L’investissement dans les unités de compte est une autre solution. Derrière ce vocable se cachent tous les types de fonds investis sur les marchés et non garantis. Mais leur niveau de risque est extrêmement variable, comme le montre la liste des 15 supports les plus souscrits au sein des contrats de Generali sur les huit premiers mois de l’année. Un seul fonds d’actions est présent dans le lot, il s’agit de Comgest Monde. Parmi les autres supports, 9 produits sont essentiellement composés d’obligations…. Ces mêmes titres que l’on retrouve dans la composition du fonds en euros. Autrement dit, la compagnie n’a rien contre le fait d’investir l’argent de ses clients sur des titres de créances, tant qu’elle ne porte pas la responsabilité de la garantie en capital. En clair, voici un assureur qui ne veut plus assurer !
Les 15 supports les plus souscrits au sein des contrats de Generali (Collecte brute 2019 à fin août)
1 CAPIMMO (PRIMONIAL)
2 GF PIERRE (GENERALI INVESTMENTS)
3 H20 Multibonds SR (H2O)
4 H20 Adagio SR (H2O)
5 Tailor Epargne HYield 1-2C (TAILOR CAPITAL)
6 H2O Moderato (H2O)
7 SEXTANT Grand Large (AMIRAL GESTION)
8 COMGEST Monde (C COMGEST)
9 Tailor Epargne HYield 1-2 (TAILOR CAPITAL)
10 SCPI ALTIXIA Commerces (ALTIXIA)
11 H2O Adagio R (H2O)
12 M and G Optimal Income A (MG)
13 EUROSE C (DNCA INVESTMENTS)
14 PFO2 (PERIAL)
15 Fidelity Euro Cash Fund A (FIDELITY)
Enfin, en 15e position des UC les plus souscrites, un fonds monétaire, Fidelity Euro Cash Fund. Ce produit, très peu risqué, perd de l’argent chaque année car les titres dans lesquels il investit affichent, eux aussi et depuis belle lurette, des rendements négatifs. Pour limiter l’impact sur les performances, la plupart des gérants de fonds monétaires ont abaissé leurs frais de gestion. Une stratégie que Generali – qui facture entre 0,75 et 1 % par an sur ses fonds en euros – devrait étudier.