Immobilier : le piège de pierre
La nouvelle vague de renégociation de crédits immobiliers est un signe supplémentaire de la fièvre immobilière qui frappe notre pays. La pierre aspire une part toujours plus grande de l’épargne des Français. Un placement supposé sûr qui pourrait se transformer en piège.
Par François Vidal les échos
Publié le 25 déc. 2019 à 16h12
Mis à jour le 26 déc. 2019 à 9h04
Renégocier son crédit immobilier est devenu un sport national. Un nouveau prêt sur quatre est désormais le fruit d’une renégociation. C’est évidemment une très bonne nouvelle pour les ménages qui ont acquis récemment un logement en s’endettant, et ils sont nombreux. Ils regonflent ainsi leur pouvoir d’achat en tirant le meilleur parti du faible niveau des taux d’intérêt.
Un aspirateur à épargne
Mais c’est surtout un nouveau signe de la fièvre immobilière qui frappe notre pays. Après cinq ans de ruée vers la pierre, l’ensemble des indicateurs du secteur indiquent une surchauffe. Les prix dans les grandes villes , le nombre de transactions, la production de crédits immobiliers et donc, à présent, leur taux de renégociation, tous ces marqueurs frôlent ou dépassent leur niveau record.
Ces chiffres reflètent bien sûr le succès rencontré par la politique de taux bas de la BCE auprès des candidats à l’accession à la propriété. Ils témoignent aussi de la volonté des épargnants inquiets pour leur avenir de mettre leur argent à l’abri dans un placement supposé sans risque au même titre que l’assurance-vie ou le livret A . En clair, l’immobilier est devenu un gigantesque aspirateur à épargne.
Un enjeu économique majeur
Un phénomène qui appelle une question. Ces centaines de milliards d’euros qui s’investissent dans des appartements et des maisons mois après mois, ne seraient-ils pas mieux utilisés ailleurs ? Car après tout, en dehors des notaires, des agents immobiliers, des artisans du bâtiment et surtout de l’Etat et des collectivités locales, ce formidable appétit pour la pierre ne profite pas à grand monde.
Crédit immobilier : pourquoi les renégociations font si mal aux banques
Il ne favorise en tout cas aucun projet d’avenir si nécessaire pourtant au développement de notre économie. Et, dès lors que le stock de crédits à l’habitat - il s’élève à plus de 1.000 milliards d’euros - dépasse désormais celui des prêts aux entreprises, s’interroger sur le sujet et ses conséquences devient un enjeu économique majeur.
Le secteur ne va pas tarder à atterrir
D’autant que le ciel de l’immobilier ne va pas rester bleu éternellement. Ces dix dernières années, la pierre n’a cessé d’engranger les bonnes nouvelles : accroissement de la demande, baisse des taux d’intérêt, forte incitation des banques… Mais cette période touche à sa fin.
Les banques viennent de se faire rappeler à l’ordre par les autorités , les taux ne baisseront pas beaucoup plus et à ces niveaux de prix, la demande n’est pas extensible. Le secteur ne va donc pas tarder à atterrir. Après des années d’euphorie, c’est sans doute une bonne chose. Mais cela signifie que les prix vont se stabiliser, voire se dégrader, et que l’aspirateur à épargne risque de se transformer en piège pour les sommes colossales qui s’y sont investies ces dernières années.
François Vidal