L’edito d’edouard carmignac - 1er trimestre 2010
16/04/2010 Welcome to the Grand Venetian
Madame, Monsieur,
« Welcome to the Grand Venetian ». Le plus grand casino de Macao est intégré dans une fidèle réplique de Venise, avec ses palais aux façades colorées dans une variété de pastels, ses canaux, ses ponts, sans omettre ses gondoliers - chinois bien entendu, mais en tenue - déclamant les airs les plus célèbres du bel canto.
Au terme de mon périple annuel dans une Chine dont le dynamisme et les transformations ne cessent de me rendre songeur, mon retour dans une Europe en panne renforce mes alarmes. Il y a à peine six mois, je vous écrivais « au vu des taux actuels des emprunts d’Etat, les marchés sont particulièrement bienveillants envers nos gouvernements. La vigueur de la reprise escomptée pour résorber cet endettement nous semblant illusoire, il est sérieusement à redouter que les investisseurs ne deviennent plus discriminants ».
Aujourd’hui, la crise grecque est généralement perçue comme une péripétie mineure, à laquelle il faudra bien porter remède au cas où l’intervention du FMI s’avèrerait insuffisante. Comment refuser de voir que cette crise remet fondamentalement en cause l’euro, en tant que mécanisme de protection trompeur et pernicieux, ayant indûment protégé de la sanction des marchés les gouvernements de la plupart des pays de la zone dont les erreurs en matière de gestion des finances publiques et de règlementation du travail sont accablantes. N’est-il pas pour le moins surréaliste que le chef de file de l’opposition en France, ayant largement remporté la dernière consultation électorale, ait été à l’origine de l’instauration des 35 heures ?
Les leçons de la crise grecque ne sont pas entendues. Et les réformes qui auraient pu être effectuées dans des conditions relativement indolores, seront mises en place brutalement, sous la pression des marchés, et au prix d’un appauvrissement généralisé.
Aussi ne me semble-t-il pas illusoire que les prospectus touristiques distribués en Asie sous l’intitulé « Welcome to the Grand Europe » ne vantent bientôt la beauté de nos femmes, l’attrait de nos villes musées et notre air non pollué par la disparition de nos industries, tout cela dans des packages rendus irrésistibles par la baisse de notre devise.
Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de ma considération choisie.
Edouard Carmignac