PAR JEAN-MICHEL COQUEMA
L’intérêt de l’assurance-vie en matière de transmission du patrimoine n’est aujourd’hui plus à démontrer. Pendant longtemps, la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie se bornait à désigner une personne déterminée, souvent le conjoint et, dans l’hypothèse de son pré-décès, suivaient les descendants. Une telle désignation connaît ses limites.
En utilisant le démembrement de propriété, le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie a la faculté de désigner un bénéficiaire en usufruit, qui recevra les revenus générés par le contrat, et un bénéficiaire en nue-propriété, qui recueillera le capital au terme.
Cette technique permet d’avantager l’usufruitier, par exemple le conjoint ou partenaire, qui peut éventuellement disposer des sommes au travers d’un quasi-usufruit, tout en préservant les droits du nu-propriétaire, généralement les enfants. Il est également possible d’aménager la transmission d’un capital sur plusieurs générations, par exemple en désignant ses enfants usufruitiers et ses petits-enfants nus-propriétaires, l’ensemble de ces opérations intervenant dans un cadre fiscal privilégié.
Aucune taxation
Avec la fiscalité successorale - déjà avantageuse -, de l’assurance-vie, les capitaux transmis sont taxés à 20 %, sur la fraction excédant 152.500 euros par bénéficiaire. Mais l’utilisation du démembrement de la clause bénéficiaire permet d’optimiser cette fiscalité. L’administration fiscale estime en effet que l’usufruitier est seul bénéficiaire et donc redevable du prélèvement de 20 %. Il est donc avantageux de désigner le conjoint ou le partenaire de pacs de l’assuré désigné comme bénéficiaire en usufruit, puisque ces personnes sont, elles, exonérées de la taxe. Aucune taxation n’est donc due au décès de l’assuré.
Au décès de l’usufruitier, le capital est transmis aux nus-propriétaires, à nouveau sans aucun droit, par le jeu de l’extinction de l’usufruit. Au final, l’opération est donc totalement exonérée de droits à payer.
Défavorable après 70 ans
Lorsque le capital transmis a été constitué par des primes versées après les 70 ans de l’assuré, la fiscalité de l’assurance-vie est alors plus défavorable : les droits de succession sont dus quand elles dépassent 30.500 euros.
Certes, si le conjoint ou partenaire de pacs a été désigné comme bénéficiaire en usufruit, il est exonéré de droits de succession. Mais dans ce cadre, l’administration fiscale n’estime plus qu’il soit le seul bénéficiaire. Le nu-propriétaire subit alors une taxation au titre des droits de succession déterminée en fonction de son lien de parenté avec l’assuré, la nue-propriété étant évaluée en fonction de l’âge de l’usufruitier (50 % de la pleine propriété si l’usufruitier a entre 51 et 61 ans, 40 % s’il a entre 61 et 71 ans…).
On peut s’étonner de cette interprétation où des conclusions différentes sont tirées d’un même fait générateur, le dénouement du contrat. Un avantage demeure cependant : lors du décès de l’usufruitier, le nu-propriétaire récupérera les sommes placées sans aucune taxation, toujours à raison de l’extinction de l’usufruit. Il n’y aura donc pas de double imposition.
La clause bénéficiaire démembrée offre, on l’a vu, de nombreux avantages. Il convient cependant de la rédiger avec précaution, en définissant précisément les droits et obligations de chacun des bénéficiaires, et en en maîtrisant l’impact fiscal.